Vu l’intérêt récent (dans la presse) à propos de notre point de vue sur les fresques B.D. à Bruxelles et leur recontextualisation récente par la Ville de Bruxelles, nous souhaitons réactualiser et repartager avec vous notre communiqué de presse écrit il y a deux ans. Nous partageons également la vidéo faite par Les Grenades – RTBF à l’époque.
Depuis plusieurs dizaines d’années, la Ville de Bruxelles visibilise sur ses murs des personnages et des auteurs et autrices incontournables de la bande dessinée franco-belge. « Le Parcours BD fait désormais partie intégrante du paysage urbain bruxellois avec près des soixante fresques disséminées entre le Centre-Ville et Laeken », apprend-t-on sur le site bruxelles.be.
La collective Noms Peut-Être ! interroge l’espace public dans une perspective féministe. Nous avons fait les comptes. Sur les 66 fresques disséminées dans l’espace public, 93% mettent en avant le travail d’auteurs, illustrateurs et scénaristes masculins, quand seulement 7% mettent en avant le travail d’illustratrices et d’autrices. Cela participe à l’invisibilisation des femmes dans l’espace public. L’invisibilisation se fait aussi pour les personnages représentés, avec seulement 21% de personnages féminins mis à l’avant plan (tels que Yoko Tsuno, Martine, Natacha et Tamara) pour 79% de personnages masculins.
Pire, certaines fresques semblent même glorifier le harcèlement sexiste de rue, qui est le quotidien des femmes dans l’espace public et qui est réprimé par une loi de 2014 dans notre pays. D’autres stéréotypes sont également propagés par les fresques, certaines femmes sont par exemple hypersexualisées ou sont montrées uniquement dans un rôle de mères. On retrouve aussi des illustrations racistes, transphobes, etc.
La collective Noms Peut-être ! demande à ce que ces fresques soient recontextualisées d’un point de vue féministe quand cela est possible. Certaines, les plus problématiques, n’ont pas leur place dans un espace réellement « public ». Nous demandons qu’elles soient retirées des murs de notre ville.
Nous demandons aussi que les prochaines fresques soient systématiquement et uniquement le travail d’autrices diversifiées mettant principalement en avant des personnages féminins, et ce jusqu’à atteindre la parité.
Malheureusement, depuis 2020, date à laquelle nous avons fait part à la Ville de nos résultats et propositions, sur les 6 nouvelles fresques réalisées, 2 sont encore issues d’auteurs (Un monde à l’envers et Yasmina) et 1 est issue d’un duo mixte (Les Crocodiles). A ce rythme là, il faudra des décennies pour aboutir à l’égalité…
– Recontextualisation par la ville de Bruxelles –
Nous pensons que les textes de recontextualisation doivent être directement visibles à même le mur. Un tout petit code QR, comme celui qui vient d’être placé, pour des fresques de plusieurs mètres carrés, n’est pas suffisant. En voici les raisons :
* Manque d’accessibilité à toute une tranche de la population : tout le monde n’a pas un smartphone qui lit les code QR
* La recontextualisation est très peu visible, puisqu’elle n’est pas directement apposée sur le mur.
* Il n’y a aucune explication sur la pancarte, cela n’incite pas à scanner.
Nous souhaitons aussi mettre en avant les incohérences dans les textes recontextualisations (www.parcoursbd.brussels). Les textes sont très inégaux sur le degré de contextualisation. L’écriture inclusive est parfois utilisée, parfois pas. Certains ne questionnent pas les stéréotypes et violences des fresques et donnent surtout le point de vue de l’auteur de la B.D.
– Pour les fresques les plus problématiques –
Certaines, les plus problématiques, n’ont pas leur place dans un espace réellement « public ». Nous demandons qu’elles soient retirées des murs de notre ville.
A la place, nous proposons d’y ajouter une fresque mettant en avant le travail d’une autrice avec une plaque explicative rappelant l’ancienne fresque et pourquoi elle a été enlevée. Ceci permet de ne pas effacer l’histoire, ni le débat, tout en permettant à chacune et chacun de se sentir à l’aise et respecté dans cet espace partagé.